Il ne faut pas se leurrer. Le calendrier olympique minimise cette édition 2018 des Championnats d’Europe à Novi Sad (10-13 mai). Ce n’est pas pour autant qu’un Euro se galvaude. Les enjeux individuels, à moins de deux mois du lancement officiel de la campagne olympique, s’avèrent très importants. Yann Baillon, le directeur des équipes de France, nous éclaire sur la stratégie française.

Par Ludovic Mauchien / Photos : K-Photos


 

Dans quel esprit l’équipe de France aborde-t-elle ces Championnats d’Europe ?

L’objectif, c’est de préparer l’avenir et notamment les qualifications olympiques. C’est de se mettre dans une logique de préparation, de répétition avant l’année prochaine, avec un collectif élargi, sachant que les titulaires ne tirent pas en équipe.

Comme celles-ci ne sont pas aux Jeux, les individuels restent la priorité. On les préserve, on les met dans un format olympique et cela nous permet aussi de tester d’autres personnes sur les équipes, des n°2, des n°3. Quant aux objectifs chiffrés, il n’y en a pas forcément. C’est essayer de faire le meilleur résultat possible.

Dans l’esprit, les sélectionnés individuels sont-ils les titulaires « olympiques » ?

Ce sont les titulaires sur la saison, ceux que l’on pense les plus à même de représenter la catégorie en individuel à ces Championnats d’Europe. Pour les Jeux, c’est une toute autre histoire ! Il y aura la qualification, donc de la bataille entre les concurrents pour savoir qui se qualifiera ou pas.

On a pris les n°1 de chaque catégorie, on a aussi refait confiance à ceux qui avaient de l’expérience et qui ont fait de bonnes prestations la saison passée. On a préservé les jeunes sur les individuels et on les a mis en équipe pour les former à un Championnat d’Europe.

Les titulaires jouent-ils gros ?

Oui et non. C’est un Championnat d’Europe, ce n’est pas une compétition lambda. Il faut toujours prouver que l’on est le n°1 de la catégorie et essayer de confirmer le potentiel que l’on a montré sur la saison. Comme il y a de la concurrence, des défaites amènent forcément à un renforcement de celle-ci.

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« SE METTRE DANS LA CONFIGURATION DES QUALIFICATIONS »

La sélection a-t-elle donné lieu à beaucoup de réflexion ?

Il y a eu une discussion pour toutes les catégories. C’est quand même une période particulière. On est à cheval entre ce que l’on faisait avant et le parcours olympique, qui commence la saison prochaine.

Nous, nous l’avons commencé cette année en se disant que l’on fait une répétition. On essaie de se mettre dans l’ambiance, dans la configuration des qualifications olympiques. On a fait des choix qui peuvent être surprenants, de ne pas aligner les titulaires en équipe, des choix d’expérience pour certains, pour d’autres, il s’agit de les préserver. On a essayé de construire la préparation olympique dans toutes les catégories. Il y a eu forcément discussion pour chaque caté.

Mais les choix qui vont être vraiment très importants, ce sont ceux pour les Mondiaux. On sait très bien que celui ou celle qui participera aux Championnats du monde aura l’opportunité de marquer beaucoup de points. Celui qui ne participera pas prendra beaucoup de retard si le titulaire va au bout.

Il faudra être intelligent et prendre ceux qui, sur le moment, sont les plus à même de marquer le maximum de points. Un coefficient 12, ce n’est pas négligeable !

Si dans certaines catégories, le choix paraissait assez évident, la concurrence est très serrée dans d’autres, notamment en -61 kg. Quels critères vous ont fait opter pour Lucie Ignace ?

On a fait confiance à Lucie par rapport à son expérience. Elle a enchaîné trois finales européennes d’affilée, les trois dernières. Elle en gagne deux, elle perd l’an passé sur une grosse erreur à trois secondes de la fin alors que le titre était acquis. Elle dispute aussi la finale des derniers Championnats du monde. Elle montre une incontestable régularité sur les échéances majeures. Il ne faut pas le négliger. Sur la saison, elle n’a pas été mauvaise non plus.

On a donc choisi de lui redonner notre confiance sur une compétition importante sachant que Gwendoline (Philippe) est toute fraîche. On ne veut pas qu’elle soit attendue et qu’elle fasse une contre-performance. On préfère la préserver. Elle est jeune et les JO, c’est dans deux ans. Ce sera elle, ou Leïla (Heurtault), ou Lucie. On a la chance d’avoir trois filles avec un niveau de performance important.

Après, entre Leïla et Gwendoline, qui sont en embuscade et qui se placent très bien, l’objectif est de sortir la meilleure sur les Championnats du Monde. On verra, de ces trois filles, qui sera la meilleure pour les Mondiaux. On fera un choix tranché sur la forme du moment et pas forcément sur l’expérience, la jeunesse, etc.

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« LUCIE (IGNACE) A ENCHAINE TROIS FINALES EUROPEENNES »

En -60 kg, Johann Lopez, qui s’aligne avec son club en Premier League, effectue son retour. Peut-on le voir comme une surprise ?

Oui et non, c’est un athlète régulier même si, dernièrement, Sofiane Agoudjil avait repris la place de titulaire. Mais ils se tiraient la bourre. C’est une catégorie où l’on n’avait pas forcément opté pour un athlète. Puis Johann a fait de bonnes sorties internationales. Il fait 3e à l’open de Paris, il est quart de finaliste à Rotterdam et à Rabat. On a choisi de lui redonner une chance de montrer qu’il peut performer à l’international.

Sachant qu’il y a des petits jeunes qui poussent, tels Kajith Kanasingam qui, à 18 ans, est assez régulier, ou Adam Jacqueray, le champion de France de l’année dernière. Au niveau national, ils progressent, ils viennent titiller Johann. Mais on attend de voir ces jeunes au niveau international. Il faut qu’ils nous prouvent qu’ils y ont aussi leur place. En tout cas, c’est de la concurrence intéressante.

LA SELECTION FRANCAISE

Hommes

-60 kg : Johan Lopes

-67 kg : Steven Da Costa

-75 kg : Logan Da Costa

-84 kg : Kenji Grillon

+84 kg : Mehdi Filali

Equipe : Salim Bendiab, Jessie Da Costa, Marvin Garin, Ilyes Klouz, Lou Lebrun, Maxime Relifox, Corentin Seguy

Kata : Enzo Montarello

Kata par équipe : Lucas Jeannot, Franck NGoan, Ahmed Zemouri

 

Femmes

-50 kg : Alexandra Recchia

-55 kg : Emily Thouy

-61 kg : Lucie Ignace

-68 kg : Alizée Agier

+68 kg : Anne-Laure Florentin

Equipe : Léa Avazeri, Sophia Bouderbane, Nancy Garcia, Gwendoline Philippe

Kata : Alexandra Feracci

Kata par équipe : Lila Bui, Marie Bui, Jessica Hugues

 

Para-Karaté

Jordan Fonteney (handicap mental)

Fatah Sebbak (handicap fauteuil)