Fode Ndao a toujours considéré le Karaté comme une entité. En parallèle du haut niveau sportif, le fondateur du Club Sauvegarde de Besançon s’attelle à multiplier les actions citoyennes, pour se rendre utile et de ne pas rester immobile. La dernière en date, entre deux confinements, la « caravane des pieds d’immeuble » au coeur d’un quartier prioritaire. L’objectif : rassembler grâce au Karaté. En ces temps compliqués, pour Fode, il faut innover.

Par Ludovic Mauchien / Photos : DR


« Dans cette période très difficile, nous devons innover, ne pas être à l’arrêt, réfléchir et mettre le Karaté partout, partout, partout. Il faut essayer de montrer, qu’au-delà de l’olympisme, le Karaté peut permettre de faire des choses extraordinaires ».

Fode Ndao n’a jamais eu les deux pieds dans le même sabot. Formé par son père à Dakar, au Centre Sauvegarde de Guédiawaye, il arrive en France en 1997 pour poursuivre ses études. Il est alors un athlète talentueux. Plusieurs fois champion d’Afrique, vice-champion du monde en 2000, il s’installe à Besançon où il fonde le Club… Sauvegarde en 2003.

Le haut niveau est l’un des piliers du CSB avec, notamment, Laura Sivert, championne du monde par équipe, et plusieurs internationaux sénégalais, mais Fode Ndao n’en fait pas une exclusivité. « Nous développons d’autres champs parallèles. Le haut niveau est un prétexte, mais il apprend aussi la vie : la notion de victoire, la notion de défaite, la persévérance, le sérieux, d’être actif… Le club Sauvegarde s’appuie sur ces valeurs pour aller dans les quartiers, les prisons... Nous développons aussi des actions auprès des femmes. On intervient un peu partout pour partager ces valeurs du Karaté ».

Le dernier projet en date ? La « caravane des pieds d’immeuble », qui a vu le jour cet été dans la foulée du 1er confinement. L’idée ? Proposer différentes activités, dont du Karaté évidemment, aux familles du quartier prioritaire de La Planoise. « On a vu le besoin qu’il y avait dans cette période difficile : le confinement, les gens privés de vacances, la précarité, les problèmes de voisinage liés aux trafiquants de drogue, etc. Nous avons voulu occuper le terrain en offrant aux habitants des outils, des jeux, des lieux de rencontre ».

Cours de Karaté pour tous en plein air cet été, puis dans un gymnase pour l’édition l’automnale qui s’est achevée avec le 2e confinement, footing, parcours VTT écologique (ramassage des déchets en collaboration avec les athlètes du club), « café des parents » sur les thèmes de la parentalité et des violences faites aux femmes, espace créatif pour les enfants, organisation d’une journée de festivité… Les actions se sont multipliées pour « créer des liens, amener une certaine discipline, partager ces valeurs citoyennes que l’on retrouve dans le Karaté », poursuit Fode Ndao. « Le Karaté est le pilier de tout car on y apprend le refus de la médiocrité, le travail du self contrôle. C’est très important ! On doit mettre les valeurs citoyennes du Karaté en avant ».

Le secret de la réussite du projet ? Les partenariats développés avec les autorités locales, la mairie de Besançon, la préfecture, la Mission locale, le centre de loisirs des jeunes de la police nationale, différentes associations du quartier de La Planoise, l’entreprise Polly Games, qui a fourni des jeux géants… « C’était très compliqué pour nous mais on a relevé le défi. Il fallait innover avec le Covid 19 et respecter les règles sanitaires, discuter avec le préfet, lui donner un cahier des charges qui lui permette de nous faire confiance. C’est important ! Il faut présenter des cahiers des charges assez clairs pour que les autorités nous fassent confiance. On doit montrer que le Karaté a d’autres vertus que le haut niveau et peut s’inscrire dans une démarche citoyenne, créer des liens entre tous. Ce sont des périodes où l’on peut se replier sur soi et ce n’est pas bon. Il faut justement garder les liens, vivre en société, vivre ensemble et continuer ».

Prochaine étape ? la caravane d’hiver. Mais, confinement oblige, il faudra à nouveau innover. « Nous allons essayer de faire une compétition virtuelle, pour créer des liens avec les habitants, les parents, les associations, qu’on puisse travailler et rigoler sur Zoom. Une caravane ne s’arrête pas. Elle stoppe quelque part et elle reprend la route. Et la route est longue ».