Double championne du monde par équipe 2016 et 2018, la Française Leïla Heurtault, 25 ans, pensionnaire du Samouraï 2000 au Mans, est toujours en course pour la qualification olympique. Très souvent au premier plan dans les compétitions internationales, elle se remémore pour nous son combat victorieux en 2018 lors du 1ère League de Rabat (Maroc) contre la n°1 mondiale, la Chinoise Xiaoyan Yin.

Par Florian Fournier / Photos : Kphotos


 

« A Rabat, en 2018, je réalise un combat marquant et décisif pour la suite de ma carrière contre la Chinoise n°1 mondiale des -61 kg. Je n’ai pas l’habitude de me souvenir avec exactitude de mes combats, mais celui-ci m’a marquée.

Ce combat se déroule en finale, dans une ambiance particulière. Défaite lors de la compétition précédente par cette même adversaire, je ne suis pas marquée psychologiquement et j’arrive en finale détendue. Avec mon coach Didier Moreau, nous avions travaillé tactiquement sur son karaté. C’est une combattante qui ne recule pas, elle a même tendance à se rapprocher quand on fait une technique.

Sur ce match, c’est elle qui marque la première mais ça ne m’a pas affectée et je suis restée sereine. J’étais persuadée que ma chance de marquer allait arriver. C’est ce qui s’est produit. Sur un Yoko geri que j’effectue légèrement hors distance, elle avance, je reprends alors mon appui pour placer un Ura Mawashi geri jodan qui me rapporte 3 points et me permet de passer devant.

A cet instant, je savoure la technique et je prends conscience que je suis capable de la battre. Je réalise peu souvent des techniques de jambes et en rentrer une contre une telle adversaire, ça booste la confiance. J’étais sur mon petit nuage, c’était comme dans un rêve où tout se passe comme prévu.

Au final, je m’impose 4-1. J’ai totalement réalisé l’importance de cette performance quand je suis sortie du tatami. On n’arrêtait pas de me dire : « tu as battu la n°1, tu lui as mis un Ura splendide, regarde il y a même la photo… ». Mais c’est surtout le fait d’avoir réalisé un combat où j’ai été très tactique qui m’a fait évoluer. C’était un aspect de mon karaté que je n’avais pas totalement à mon arc à ce moment-là.

J’ai eu un déclic sur cet aspect grâce à la compétition précédente où elle me bat. En la retrouvant en finale, je n’avais pas de pression car le podium était assuré. Alors, j’ai fait confiance à Didier, à notre travail mis en place par rapport à elle et tout s’est passé comme prévu.

Autre déclic mais là post combat, la confiance engrangée par cette victoire et la manière dont je l’ai obtenue m’a permis d’avancer pour le reste de ma carrière et faire que j’en suis à ce niveau.

Aujourd’hui, je suis convaincue que lorsque je suis menée, si je m’applique à suivre les consignes, il n’y a pas de raison que cela ne passe pas et que je vais m’imposer.

Ce combat est aussi marquant sur le plan de la qualification olympique. C’était au début de cette phase de qualification et cette victoire m’a parfaitement lancée mentalement et comptablement parlant pour les JO. Sans savoir qu’aujourd’hui on traverserait une époque particulière, cette victoire est fondamentale dans mon parcours olympique. Cependant, je n’ai pas senti que mon statut par rapport aux autres évoluait. Battre la n°1 mondiale n’a pas fait de moi une « warrior » et je suis restée les pieds sur terre pour continuer mon travail en restant fixée sur mon objectif.

En parlant d’objectif, s’il y a bien un combat qui pourrait sortir celui-ci de ma mémoire, ce serait une victoire en finale des championnats d’Europe qui me qualifierait pour les Jeux. Peu importe l’adversaire et la manière, le fait de me qualifier aux Jeux serait inoubliable. Mais, pour le moment, nous sommes dans le flou… »